Le 20 juillet 2023, la Chambre des députés a voté une loi réformant le droit d’établissement au Luxembourg (ci-après la « Loi de Modernisation »), laquelle modifie et modernise la loi du 2 septembre 2011 réglementant l’accès aux professions d’artisan, de commerçant, d’industriel ainsi qu’à certaines professions libérales.
La Loi de Modernisation pose les bases d’un cadre plus clair et mieux adapté aux changements intervenus dans les environnements réglementaire, économique, technique, technologique, entrepreneurial et artisanal, ceci afin de stimuler l’esprit d’entreprise.
Les principaux changements introduits par la Loi de Modernisation sont les suivants :
- Limitation du nombre d’autorisations d’établissements accordées à une personne physique. La Loi de Modernisation instaure qu’une personne physique ne peut être désignée comme dirigeant de plus de deux entreprises artisanales (hormis pour des entreprises appartenant même groupe). Cette limitation n’est cependant pas d’application si cette personne détient, directement ou indirectement, dans chacune de ces entreprises au moins 25 pour cent des parts sociales.
- Clarifications concernant les exigences requises pour l’octroi d’une autorisation d’établissement. Le législateur luxembourgeois a profité de la Loi de Modernisation pour clarifier et adapter certaines conditions liées à l’octroi d’une autorisation d’établissement :
- Gestion effective et permanente de l’entreprise. La Loi de Modernisation confirme une pratique courante de l’administration suivant laquelle cette condition n’est remplie que si le détenteur de l’autorisation d’établissement est physiquement présent dans l’entreprise.
- Qualité du détenteur de l’autorisation d’établissement. Auparavant, la loi prévoyait que le dirigeant devait être associé, actionnaire ou salarié de la société. La Loi de Modernisation introduit une distinction suivant que l’activité est exercée en nom personnel, auquel cas il devra être propriétaire de l’entreprise, ou que l’activité est exercée par une société, auquel cas il devra seulement être inscrit au Registre du Commerce et des Sociétés de Luxembourg en tant que mandataire.
- Conditions d’honorabilité professionnelle. Le respect de cette condition, qui vise à garantir l’intégrité de la profession ainsi que la protection des futurs cocontractants et clients, est exigée non seulement dans le chef du dirigeant, mais également du détenteur de la majorité des parts sociales et des personnes en mesure d’exercer une influence significative sur la gestion ou l’administration de l’entreprise. Constituent notamment des manquements qui affectent l’honorabilité professionnelle :
- Le recours à une personne interposée ou l’intervention comme personne interposée ;
- Le non-respect, à au moins deux reprises durant les trois derniers exercices, des obligations de dépôt et de publication découlant de la loi modifiée du 19 décembre 2002 concernant le registre de commerce et des sociétés ainsi que la comptabilité et les comptes annuels des entreprises
- Le défaut persistant sur une période d’au moins six mois de procéder à l’inscription requise par la loi modifiée du 13 janvier 2019 instituant un Registre des bénéficiaires effectifs
- Principe de nouvelle chance à la suite d’une faillite. la Loi de Modernisation introduit la possibilité pour un entrepreneur failli d’entamer une nouvelle activité avec une nouvelle autorisation d’établissement, selon le principe de la seconde chance. Ce principe est toutefois soumis aux conditions suivantes :
La faillite a été directement causée par :
- Une calamité naturelle qui a été reconnue comme telle par le Gouvernement en conseil ;
- Une destruction involontaire du lieu de production ou de l’outil de production ;
- La perte d’un client prééminent ;
- Un chantier de travail public d’envergure ;
- L’incapacité partielle ou totale de travail du dirigeant médicalement attestée ;
- Une pandémie reconnue comme telle par le Gouvernement en conseil ;
- Une perte de rentabilité à la suite d’une perturbation majeure du marché (pour autant que la faillite ait été rendue sur aveu)
L’obtention d’un accord de payement des administrations concernées si les montants dus excèdent les seuils indiqués dans la Loi de Modernisation. A contrario, aucun accord de payement ne sera requis pour des dettes n’excédant pas ces seuils.
- Simplification de l’accès à certaines professions artisanales. L’obligation de qualification professionnelle est supprimée pour certaines activités artisanales relevant de la liste C (annexée à la Loi de Modernisation), ceci afin de tenir compte des nouvelles réalités de ces métiers, dont les exigences ont évolué, notamment dans le contexte de la digitalisation.
- Introduction de nouvelles catégories d’autorisations d’établissement. Afin de répondre aux évolutions récentes de certains métiers, la Loi de Modernisation introduit l’obligation d’obtenir une autorisation d’établissement spécifique notamment pour des activités suivantes :
- Apporteur d’affaires immobilier, définie dans la Loi de Modernisation comme étant « l’activité commerciale consistant à mettre en relation un agent immobilier ou un promoteur immobilier et toute autre personne souhaitant vendre ou louer un bien immobilier » ;
- Location de courte durée, définie dans la Loi de Modernisation comme étant « l’activité commerciale qui consiste à louer des unités d’hébergement et qui s’étend à quatre-vingt-dix nuitées ou plus, cumulées au cours d’une année .» ;
- Location de bureaux ou d’espaces de travail partagés ;
- Les services commerciaux de biens mobiliers de grande valeur.
- Facilitation de la transmission d’entreprise. Un salarié ayant occupé un poste dans une entreprise depuis trois ans (contre dix ans auparavant) pourra reprendre l’autorisation d’établissement avant l’acquisition des qualifications professionnelles (qui devront être acquises dans un délai de cinq ans).
- Facilitation des démarches administratives dans l’intérêt des entreprises et des consommateurs. A titre d’exemple, il ne sera plus nécessaire de notifier à la Direction générale des classes moyennes les changements de données inscrites au Registre de commerce et des sociétés. Par ailleurs, l’autorisation d’établissement sera délivrée par transmission en ligne uniquement sur le portail d’échange dédié de l’État et consultable en ligne également pour le public sur ce même portail. Un code-barres en deux dimensions sera attribué à chaque autorisation d’établissement, lequel devra être affiché sur le site de l’entreprise et dans chaque point de vente. Ce système permettra au public d’avoir un accès en temps réel aux informations relatives notamment aux qualifications professionnelles et à la validité de l’autorisation d’établissement d’une entreprise.
La Loi de Modernisation devrait entrer en vigueur le 1er septembre 2023. Toute personne physique ou morale qui est titulaire d’une autorisation d’établissement au moment de l’entrée en vigueur de la Loi de Modernisation dispose d’un délai de 2 ans à compter de cette date pour se conformer au contenu de ladite loi.
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